L’épidémie de solitude reconnue comme un problème de santé majeur aux Etats-Unis comme en Europe nous confirme la perte du lien social qui touche l’économie dans le monde entier. Cela fait longtemps que le constat est partagé dans la société, mais plus grave, des signes inquiétants se font jour en entreprise. En France, on connait aussi le phénomène de collaborateurs fantômes, présents dans les effectifs mais jamais rencontrés « en vrai ». Comment le lieu même de la mise en commun des talents peut-il être miné par le doute que le collectif ne vaut plus la peine d’être vécu ? Comment l’entreprise peut-elle abandonner des ressources qu’elle a mis tant de temps, d’argent et d’énergie à recruter ?

 

On aimerait tellement croire que seule la rationalité compte dans les organisations et qu’il suffise de mettre la bonne personne en face d’une ou plusieurs tâches pour que tout soit réglé. Ajoutez-y une mauvaise interprétation de l’intelligence artificielle, tout comme l’idée fausse d’une destruction créatrice de valeur schumpétérienne et voilà l’avènement du chaos sous la forme d’une juxtaposition sans lien d’individus experts et solitaires censés faire fonctionner des flux de plus en plus complexes. Alors, ne peuvent que prospérer la démission, l’abandon, le repli sur soi et les sentiments « d’à-quoi-bon », menant à une casse humaine élevée !

 

L’entreprise n’est pas une machine et aucune n’existe sans esprit collectif. Travailler à ce qui uni, plutôt qu’à ce qui désunit est la clé. Reconsidérer la valeur de chaque individu à l’effort global déployé pour atteindre un objectif ce n’est pas porter un regard de béotien sur l’entreprise. De la start-up à l’ETI, des entreprises cotées aux entreprises familiales internationales, en passant par les nouveaux consortiums multi-métiers, les coachs d’organisation mènent des expériences avec succès de re-création d’un collectif en lien avec chaque culture d’entreprise. Ils confirment qu’un enrochement créateur de valeur et de bien être peut-être bâti avec exigence.

 

Penser les organisations comme organiques et vivantes, et non plus mécaniques et automatiques est un principe de départ du coaching des organisations. Même avec l’ultra-digitalisation et l’intelligence artificielle, seule la dimension humaine fait encore la différence. Reconnaître les sous-jacents des motivations, des émotions et des représentations du monde, voilà de puissants leviers qui jouent en faveur des organisations. Partir du principe simple qu’une vraie communauté de travail heureuse de fonctionner ensemble est plus performante, est une des clés du coaching d’organisation. Il révèle ainsi que les liens profonds noués au sein des équipes et des collectifs est une valeur ajoutée au service de l’entreprise. Il affirme que les mille nuances de personnalités à déceler et à faire apprécier aux autres forgent l’esprit collectif d’une entreprise. Les coachs des organisations sont bien aux prises avec le cœur de l’entreprise pour répondre à la question de pourquoi travaille-t-on ensemble et comment allons-nous nous y prendre.

 

Une fois ce changement de vision opéré, des mondes insoupçonnés de possibles se dévoilent. On peut imaginer alors des ressources incroyables autrefois délaissées, des réservoirs d’engagement et de dépassement, de loyauté au service d’une ambition, d’un avenir plus collectif, plus engageant, donc plus innovant. S’ouvrir à l’humain pour construire le collectif, quel espoir pour les entreprises !

 Mathilde GUILLOU